Les marqueurs plasmatiques pour demain ?

Les biomarqueurs sanguins semblent prometteurs pour une utilisation à large échelle, pour détecter les patients à risque, pour suivre l’effet des traitements ciblés.

Par Simone Lista et Pr Audrey Gabelle (CMRR de Montpellier)

Au cours des trois dernières décennies, des preuves de plus en plus nombreuses issues d’examens génétiques/biologiques/imagerie et d’investigations neuro-pathologiques ont permis de définir la MA comme une maladie clinico-biologique avec un continuum temporel englobant les stades précliniques.
Cela a donné lieu à la classification « AT(N) », qui utilise les biomarqueurs in vivo « A » pour amyloïde-β (Aβ1-42 et le rapport Aβ1-42/Aβ1-40), « T » pour la protéine tau hyperphosphorylée (p-tau) et « N » pour la neurodégénérescence et les lésions neuronales (t-tau ou la chaîne légère du neurofilament (NfL)).

Si pour le moment, ces biomarqueurs sont mesurés dans le LCR ou à l’aide d’une imagerie avec les contraintes d’accessibilité, d’invasivité, de coût que l’on connaît, les biomarqueurs sanguins semblent prometteurs pour une utilisation à large échelle, pour détecter les patients à risque, pour suivre l’effet des traitements ciblés. Grâce aux progrès des plateformes ultrasensibles – notamment la technologie Simoa, les immun dosages par électro chimiluminescence et la réduction immun magnétique – et de méthodes basées sur la spectrométrie de masse (MS) – notamment l’immunoprécipitation-spectrométrie de masse (IP-MS) – la quantification des protéines/peptides dans le sang devient optimale avec une bonne corrélation plasma/LCR et des sensibilités et spécificités qui permettraient une utilisation en pratique clinique.

Le récent article de Michno et al., 2021 reprend pour les peptides amyloïdes les différentes techniques utilisées dans les fluides biologiques. De nombreuses équipes sont en train de valider ces dosages sur de larges échantillons de patients et de définir leur intérêt pour le diagnostic précoce et le pronostic. Alawode et al, 2021 fait également état des perspectives d’utilisation du plasma par rapport au LCR pour le diagnostic et le suivi de la maladie. Grâce au travail collaboratif national, nous vous ferons prochainement part des résultats des dosages amyloïdes par Shimadzhu sur les cohortes françaises au sein du laboratoire de protéomique du Pr Lehmann et Pr Hirtz.

Enfin, de nouveaux candidats biomarqueurs sanguins prometteurs, reflétant d’autres aspects pertinents de la physiopathologie de la MA, sont actuellement étudiés. Il s’agit principalement de biomarqueurs de la pathologie synaptique (neurogranine et alpha-synucléine) ou de la neuroinflammation (la variante soluble du récepteur TREM2 et la glycoprotéine YKL-40). L’existence de mesures cohérentes et très sensibles des biomarqueurs sanguins, en particulier des peptides Aβ et des espèces p-tau, présente un potentiel pour le diagnostic, le pronostic et l’évaluation des résultats dans les essais cliniques sur la MA. Ces biomarqueurs seront très prochainement disponibles en pratique clinique.

Pr Audrey Gabelle

Audrey GABELLE est Professeur de Neurologie et de Neurosciences, elle est responsable du CMRR de Montpellier, de l’équipe de Neurologie Comportementale et du Centre de Compétence Démences Rares et Précoces. Elle est particulièrement engagée au sein du centre européen d’excellence maladies neurodégénératives, COEN de Montpellier. Elle préside la FCM depuis décembre 2020.